Le nouveau gouvernement à l’épreuve du crash test budgétaire

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Par Sylvain Etaix

Publié le - Mis à jour le

Après trois mois de tractations, la France dispose enfin d’un gouvernement. Le marqueur a clairement été poussé à droite afin de satisfaire aux exigences du Rassemblement national. En position de « faiseur de roi », le parti d’extrême droite n’a pas pour autant accordé son blanc seing au Premier Ministre Michel Barnier, lequel présentera son discours de politique générale le 1er octobre dans un contexte de dérapage budgétaire. Jordan Bardella a déjà annoncé que ce gouvernement n’avait « aucun avenir ». Et Michel Barnier s’est déjà excusé auprès de Marine Lepen après que le ministre de l’Économie Antoine Armand avait affirmé qu’il ne recevrait pas les parlementaires du RN pour évoquer le budget.

Pour l’ouverture à gauche, il faudra se contenter de Didier Migaud, nommé garde des sceaux, ministre de la Justice. Il devra composer avec le nouvel homme fort de la place Beauvau, Bruneau Retailleau (LR, dont la formation se retrouve en force avec 10 membres du gouvernement). Sa priorité « rétablir l’ordre ». Ses positions dures sur l’immigration et la sécurité ne sont pas pour déplaire aux 11 millions d’électeurs du RN, dans un contexte devenu explosif suite au meurtre de la jeune Philippine. Le ministre de l’intérieur est le seul « poids lourd » politique de ce nouveau gouvernement (si l’on excepte la reconduction de Rachida Dati à la Culture). L’absence de « figure » dans cette nouvelle équipe frappe les esprits tout comme la création du poste de Ministre déléguée en charge de la coordination de la politique gouvernementale (Marie-Claire Carrère-Gée) et le rattachement de Bercy à Matignon.

L’économie et le budget aux macronistes

Les postes clés que sont l’économie, le budget et les comptes publics reviennent à deux macronistes : Antoine Armand (33 ans) et Laurent Saint-Martin (39 ans). Tous deux sont des fervents défenseurs de la politique de l’offre. Directeur général de Business France, Laurent Saint-Martin avait pour mission de faire rayonner la France à l’international, ce qu’il a parfaitement réussi à faire (lire également l’événement Choose France à Berlin qui s’est tenu le 26 septembre). Sans doute aura-t-il à l’esprit de ne pas ternir l’attractivité de la France et détricoter la politique pro-business mise en place depuis 2017, tout en étant garant d’un budget rigoriste. Le signal envoyé par l’éxécutif au monde des affaires se veut rassurant : les têtes changent mais la politique envers les entreprises ne va pas totalement varier. Les syndicats patronaux se voient plutôt rassurés de pouvoir négocier avec des interlocuteurs conscients des enjeux en terme d’emplois, d’investissement et de croissance (ce qui aurait été une autre paire de manches avec un gouvernement LFI), mais l’inquiétude patronale reste vive. Face à la hausse des défaillances, les représentants de la CPME s’inquiètent de la coupe annoncée dans les aides aux entreprises. Un rapport de l’Inspection générale des finances estime à plusieurs dizaines de milliards d’euros les économies possibles.

Michel Barnier a prévenu : il compte surtout sur les plus « aisés » pour redresser les comptes de l’État : les ménages les plus riches et les grandes entreprises. « Les prélèvements ne doivent pas entraver la croissance » a tenté de rassurer le nouveau Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie Antoine Armand. Une croissance qui peine toujours à repartir de l’avant (1,1% pour 2024 selon la Banque de France) malgré l’effet JOP.
La composition du nouveau gouvernement (annoncée samedi 21 septembre) intervient au moment même où l’économie française recommence à perdre des usines. Une enquête du cabinet Trendéo publiée le 22 septembre, révèle qu’entre avril et août 2024, l’Hexagone a enregistré plus de fermetures (47) d’usines que d’ouverture (37). Le solde de la création d’emploi demeure positif (10 950 postes) mais il chute de 44% par rapport à la même époque il y a un an. La tâche de Marc Ferracci, le nouveau Ministre de l’Industrie, s’annonce donc ardue. Mais la question que tout le monde se pose : quelle sera la durée de vie de ce gouvernement qualifié par Michel Barnier de « républicain, progressiste et européen » ? Le crash test budgétaire avec la prochaine loi de finances sera révélateur, sachant que les blocs parlementaires des deux extrêmes peuvent censurer le nouveau gouvernement à tout moment.

 

C’est la question que tout le monde se pose : Combien de temps ce gouvernement, que Michel Barnier qualifie de « républicain, progressiste et européen », tiendra-t-il ?
Les blocs parlementaires des deux extrêmes peuvent à tout moment voter la censure du nouveau gouvernement.